Acheter responsable, acheter durable

L'achat responsable, thème du dernier atelier de l'Institut et dont le périmètre est très large (de la ramette de papier de bureau jusqu'au chantier de construction de logements), est un enjeu économique pour les territoires, une question de survie pour l'environnement, une notion d'éthique pour les organismes Hlm.

S’engager dans l’achat responsable, c’est espérer des bénéfices d’ordre sociaux, écologiques et économiques pourl’organisme etl’ensemble de ses parties prenantes. Si cet engagement est un défi pour l’organisme Hlm d’un point de vue organisationnel, il représente un certain nombre d’intérêts, en termes de contribution aux enjeux économiques et environnementaux des territoires, d’implication des parties prenantes, et d’image. Amel Tebessi rappelle que l’Institut Hlm de la RSE encourage clairement les organismes Hlm à s’engager davantage sur le champ des achats responsables, avec des questions d’éthique à toutes les échelles et qui concernent l’ensemble des parties prenantes.

La relation aux fournisseurs

Elle est particulièrement mise en lumière dans une stratégie de définition d’une politique d’achats responsables. En effet, si toute la chaîne est impactée, la notion de réciprocité entre l’acheteur et le fournisseur est essentielle. L’Obsar (Observatoire des achats responsables) souligne que les contraintes budgétaires sont mises en avant comme un réel frein au développement des achats responsables. Mais sur la durée, les achats responsables ne sont pas plus coû- teux ; c’est même l’inverse, l’entreprise en tire un certain nombre de bénéfices. Il s’agit dès lors de s’inscrire dans une logique de développement durable et donc de ne pas avoir une approche court-termiste dans l’évaluation coût – bénéfices mais bien globale et durable.

Outils et méthodes

• Le référentiel ISO 20400, bientôt sur le marché, est le registre de la recommandation, comme ISO 26 000 dont elle vient d’ailleurs en déclinaison.

• Un label «Relation Fournisseurs Responsables », porté par le Médiateur des entreprises et le CDAF, existe également mais il est plutôt adapté pour les très grandes entreprises.

• Ecovadis propose par ailleurs une solution d’évaluation (via un système de notation en ligne) des fournisseurs. Par ailleurs, il est essentiel de développer une approche coût global surla vie des produits (TCO = total cost of ownership). Un achat responsable aspire en effet à réduire les impacts négatifs. La vision globale de l’approche du « coût du cycle de vie» est essentielle : c’est l’approche « cradle to cradle », soit du berceau au berceau (et non du berceau à la tombe).

Par ailleurs, il est précisé que les organismes souhaitant structurer une démarche RSE d’achats responsables peuvent solliciter une aide du Fonds pour l’innovation sociale. Mélanie Czepik (ORSE) apporte quelques éclairages de pratiques d’autres secteurs en matière d’achats responsables. Des éléments de méthode sont également élaborés par l’ORSE afin d’outiller les entreprises souhaitant s’engager davantage sur ce champ: questionnaire d’évaluation des prestataires, cartographie des risques, modalités de notation, etc.

Quelles sont les obligations juridiques pour les organismes Hlm  ?

Alima Mial(USH) expose les obligations juridiques pourles organismes Hlm en matière d’achats responsables autour de deux textes majeurs. L’article 13 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire a institué l’obligation d’adopter et de publier un schéma de promotion des achats publics socialement responsables, lorsque le montant total annuel des achats est supérieur à 100 millions d’euros H.T.(Cf. décret n° 2015-90 du 28 janvier 2015).

Cet article a été modifié par l’article 76 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pourla croissance verte afin d’étendre ce schéma à la promotion des achats publics écologiquement responsables.

Achats responsables et insertion par l’activité économique

• Isabelle Sery (USH) rappelle que les organismes Hlm ont une pratique ancienne de l’achat responsable, qui s’est traduite par des marchés confiés à des structures d’insertion parl’activité économique (régies de quartiers, en particulier). Ces marchés ont pris un essor particulier, il y a une douzaine d’années, par l’obligation faite par l’Anru de réserver des heures d’insertion dans tous les marchés concernant des opérations de rénovation urbaine. Cette obligation a réimpulsé une dynamique qui se poursuit dans de nombreux organismes qui ont généralisé les clauses d’insertion dans leurs marchés.

• Anna Fontaine (AVISE) précise que les achats socialementresponsables désignent les transactions commerciales entre organisations publiques ou privées et entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) au sens large. Les 4000 structures d’insertion par l’activité économique sont en grande majorité des associations et des TPE/PME (SARL, SAS, SCOP, etc.). Elles sont conventionnées parl’État pour accueillir des salariés en difficulté sociale et professionnelle, dans le cadre d’un contrat de travail de deux ans maximum.

On met souvent en avant dans l’insertion par l'activité économique les secteurs traditionnels : entretien des espaces verts, recyclage des déchets, propreté, restauration… mais depuis quelques années, se développent également de nouvelles activités innovantes telles que la numérisation, les prestations informatiques et la communication. Le projet «Loin des machines» l’illustre. C’est un projet porté par Logis Transports, et une structure de l’insertion, LDM, qui ont mis en place une solution innovante dans le domaine de la communication autour d’un chantier. Dans l’objectif de favoriser l’intégration socioprofessionnelle de jeunes des quartiers ayant des qualifications dans le domaine multimédia en Île-de-France et des difficultés d’accès à l’emploi, un marché a été lancé avec une clause sociale visant à produire un site Internet dans le cadre de la construction de nouveaux projets urbains.

De la mise en place d’actions concrètes à la définition d’une politique d’achats responsables : l’action des organismes Hlm

• Lydia Goupille Saout (Silène) indique que dans le cadre de son projet «stratégique et responsable», l’OPH a souhaité engager un travail en profondeur surl’ensemble du processus acheter. Silène a la volonté de structurer ces achats en donnant une approche professionnelle à cette activité incontournable tout en priorisant la promotion du développement durable et sa responsabilité sociale. Cette professionnalisation des «achats» a pour objectif principal de permettre la satisfaction et la fidélisation des locataires en mettant en place un pilotage performant de ses achats et de ses prestataires tout en garantissant une maîtrise des charges locatives (critères et clauses d’achat éco et socio-responsable, développer les achats en faveur des PME…). Silène a sollicité un appui du FSI pour le financement d’un accompagnement par un consultant de cette démarche.

• Gisèle Petiot (Loire Habitat) explique que, certifié ISO 9001 puis évalué ISO 26000, l’OPH a développé une démarche d’écoute des parties prenantes, et plus précisément des fournisseurs. Il s’agit de concilier qualité des prestations et satisfaction des locataires. L’enjeu de cette charte relations fournisseurs est de décliner les attentes et les exigences en cohérence avec les valeurs, de renforcerles relations partenariales avec les fournisseurs, favoriser des relations mutuellement bénéfiques dans le respect de la réglementation, avec le souci de préserver l’environnement, et dans une logique d’efficacité économique et de qualité de service.

• Domitille Brezun et Isabelle Sosnowij (Reims Habitat)témoignent de la démarche RSE de l’organisme, qui a donné lieu à deux chartes, une charte éthique et une charte achats responsables. La première définit les règles de conduite, individuelles et collectives, qui doivent guiderles actes et inspirerles choix de l’ensemble des parties prenantes de l’office. Très ambitieuse et structurante, la charte «achats responsables» retranscrit ces objectifs qui structurent la politique d’achats de Reims Habitat: répondre au minimum aux dispositions écrites de la commande publique, renforcer la relation avec les fournisseurs/prestataires, améliorer la qualité des achats, consolider la politique RSE, fédérer l’ensemble des utilisateurs.

• Enfin, Haute-Savoie Habitat a mis en place en 2013 une mission économie sociale et solidaire, dontfait écho Johanna Brasseur. L’organisme Hlm a en effet une grande partie de son patrimoine situé à Annecy. Frontalière avec la Suisse, le coût de la vie dans cette ville et ce bassin d’emploi esttrès élevé. Il a dès lors été engagé une réflexion autour du pouvoir d’achat des locataires et de la consommation «raisonnée», plus locale, de meilleure qualité, moins chère. Une conciergerie solidaire a été créée, portée par une structure d’insertion. Des espaces de coworking au sein même de Haute-Savoie Habitat sont ouverts pour des entrepreneurs. L’idée est de mettre en avant les compétences créatives des locataires. L’écopâturage est développé, sous forme de bergerie de quartier, les espaces verts transformés en potagers, en partenariat avec des maraîchers et agriculteurs.

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